Les bénéfices de l’alimentation bio pour la santé : le journal Le Monde fait le point

Le Monde a consacré un dossier complet dans son supplément science et médecine du 6 novembre à ce thème d’actualité à un moment où les ventes des produits bios baissent alors que celle des produits ultra-transformés, dont on sait à quel point ils sont problématiques pour la santé, explosent. Cet article fait une bonne synthèse commençant par une étude intéressante publiée en 2021 sur l’évolution de la santé, en particulier des défenses immunitaires de perdrix nourries avec du blé et du maïs conventionnel ou bio. En quelques semaines d’expérience seulement, les “perdrix conventionnelles” voient leur système immunitaire déréglé par rapport à celui des “perdrix biologiques”, leur taux de globules rouges réduit et la quantité de parasites intestinaux augmente. Ce type de recherches sur les animaux a débuté dès 1926 et a montré le plus souvent un impact négatif de l’alimentation conventionnelle sur les animaux. Il est plus difficile d’évaluer l’effet de l’alimentation sur les humains car on ne peut les enfermer toute une vie dans un laboratoire pour avoir des résultats comparables. Cependant, comme le rappelle le biochimiste Denis Lairon (INSERM): “Les premières tentatives visant à évaluer l’impact sanitaire de l’alimentation bio ont été faites grâce a une cohorte d’enfants dont certains étaient issus de familles suivant un mode de vie dit “anthroposophique” en Suède, privilégiant notamment l’alimentation bio – il faudrait ajouter “et biodynamique. Ces travaux,… suggèrent un effet sur l’immunité, en particulier un risque d’allergie diminué chez ces enfants.”1

D’autre travaux plus récents vont dans le même sens, comme le résume une importante étude publiée en 2022 “la consommation régulière d’aliments issus de l’agriculture biologique est associée à des risques réduits d’obésité, de diabète de type 2, de cancer du sein post-ménopause et de lymphome.” Il est à noter que toutes les maladies citées ci-dessus sont en forte augmentation.

Un autre aspects découvert est la perte de points de QI liée à l’effet sanitaire des pesticides. On se dira qu’avec de tels résultats – même si, comme le dit Denis Lairon, le nombre d’études disponibles est encore limité – toutes les institutions garantes de la science et chargées de la santé des citoyens devraient soutenir la recherche sur les effets de la bio sur la santé ainsi que la conversion en bio. Malheureusement, c’est tout le contraire, comme l’explique Stéphane Foucart dans un encadré. Le journaliste du Monde est bien placé pour relever ce fait car il est également le coauteur d’un ouvrage (4) révélant comment les amateurs de science se sont transformés en relais zélés des messages de l’industrie tout en se considérant comme des « gardiens de la raison ». En effet dès qu’une publication mettant en évidence les bénéfices de la bio est suffisamment médiatisée, au lieu d’être relayée et soutenue, elle est soumise à des critiques immédiates. Ainsi, 3 jours après la publication en 2018 d’une étude sur 70 000 personnes montrant la baisse notable de certains cancers chez les gros consommateurs de bio, l’Académie d’agriculture de France n’a rien trouvé de mieux que de diffuser sur son site un point de vue de deux de ses membres éreintant l’étude. En 2019, c’est au tour de l’Académie de médecine de critiquer une étude montrant l’intérêt de la consommation de fruits et de légumes bio. Denis Lairon s’insurge contre ces critiques d’une étude parue dans une revue scientifique de haut niveau. Quant à l’Insitut national du cancer, qui devrait tout faire pour limiter les causes de cancer, il va encore plus loin en publiant sur son site web que l’affirmation selon laquelle « manger bio permet de diminuer le risque de cancers » relève d’une infox. Le Monde a demandé un accès aux documents administratifs pour connaître la genèse précise de ce communiqué. Les documents révèlent que 4 chercheurs d’instituts publics animateurs d’un réseau travaillant sur la prévention des cancers avaient protesté sans qu’une suite ne soit donnée à leur requête. Pour Denis Lairon c’est l’Institut national du cancer qui frôle la fake news dans sa communication.

Comment espérer avoir un développement de la bio pour le bien-être de tous les consommateurs dans un tel contexte ?

  1. source : Atopy in children of families with an anthroposophic lifestyle