Webinaire Recherche, Science & biodynamie : 8 conférences en ligne et gratuites !

Changement de programme : la conférence de Jean MASSON initialement prévue le 23 avril est annulée.

A l’occasion des 100 ans du Cours aux Agriculteurs, l’association Biodynamie Recherche, en partenariat avec le MABD, donne la parole aux chercheuses et chercheurs qui travaillent aujourd’hui sur le thème de l’agriculture biodynamique dans le monde académique.

Au cours de ce cycle de 8 conférences en ligne et gratuites, nous explorerons les travaux, les perspectives et les questions posées par des chercheurs de différentes disciplines : histoire des idées, sociologie et anthropologie, épistémologie, mais aussi agronomie, zootechnie, sélection, génétique et biologie moléculaire, chronobiologie, alimentation…

Nous vous donnons rendez-vous tous les mardis soir de 20h à 21h30, du 19 mars au 7 mai 2024, pour ces 8 conférences suivies d’échanges.

Participation libre et inscription obligatoire !

Les enregistrements des premières conférences sont dores et déjà disponibles en REPLAY sur notre chaîne YouTube !

Programme

Le Cours aux Agriculteurs, Rudolf Steiner et l’anthroposophie au tournant du XXe siècle : fondements théoriques et pratiques d’une agro-écologie spirituelle.

Mardi 19 mars 2024 à 20h

Avec Aurélie Choné, chercheur et professeur des universités à l’Université de Strasbourg, faculté Mondes germaniques et nord-européens. Ses champs de recherche sont la littérature et l’altérité culturelle – réception des pensées et religions orientales, en particulier indiennes, dans l’espace germanophone (19e-20e siècles), littérature et spiritualité (étude des courants ésotériques (notamment l’anthroposophie) – ainsi que la littérature et la spatialité.

Aurélie Choné propose d’expliquer en quoi le projet anthroposophique consistant à « repenser la nature » s’intègre dans une histoire des idées riche et complexe, et quelles en ont été les résonances jusqu’à aujourd’hui, notamment sur les mouvements environnementalistes et l’écologie spirituelle. En effet, quand on parle d’agriculture biodynamique, c’est toute une vision du monde qui est en jeu, qui implique à la fois des savoirs sur la nature, sur l’environnement et sur l’agriculture. La biodynamie est issue des conférences données par Rudolf Steiner il y a 100 ans, à l’occasion du Cours aux Agriculteurs. A l’époque déjà, les idées développées par Steiner étaient radicales et novatrices, et s’inscrivaient dans le contexte socio-politique des mouvements de réforme de la vie (Lebensreform) qui traversent l’espace germanophone autour de 1900.

Au cours de cette conférence, nous présenterons le parcours de Rudolf Steiner ainsi que le contexte historique dans lequel a émergé sa pensée, et nous étudierons la position du fondateur de l’anthroposophie par rapport à la science de son époque. On s’efforcera ensuite de recenser les savoirs à l’œuvre dans le Cours aux agriculteurs, puis de mettre au jour la théorie de la connaissance qui sous-tend l’approche steinerienne de la biodynamie. On mettra enfin en relation ces différents éléments pour expliquer quelques prescriptions pratiques données par Steiner en lien avec les préparations biodynamiques, la dynamisation et les rythmes cosmiques.

Réanimer le monde – biodynamie et modernité alternative

mardi 26 mars 2024 à 20h

portrait jean foyer

Avec Jean FOYER, anthropologue, chargé de recherche au CNRS.

Cette présentation propose de montrer comment la biodynamie renvoie à des formes de politiques, de savoirs ou de relations à la nature dont la visée semble être tout autant d’inventer d’autres rapports au vivant face à la crise écologique que de marquer un retour à des formes de spiritualités. L’enjeu de la biodynamie serait ainsi « la réanimation du monde » au double sens vitaliste et spirituel de l’expression. Cette expression renvoie tout autant au projet écologique de la biodynamie – réinsuffler la vie dans une modernité malade de la crise écologique- qu’à son caractère spirituel qui marquerait une forme de retour à des formes d’animisme dans l’occident contemporain.  Dans ce couplage entre écologie et spiritualité, la biodynamie renvoie ainsi à des formes multiples et encore en gestation de modernités alternatives.

Biodynamie et systémique agraire : pistes de fertilisation croisée

Mardi 2 avril 2024 à 20h

Avec Cyrille Rigolot, chercheur à l’UMR Territoires, Université Clermont Auvergne, INRAE, VetAgro Sup, AgroParisTech

La systémique agraire s’est développée en France à partir des années 70, dans un mouvement de dissidence vis-à-vis de la modernisation. Ce courant de recherche académique est fondé sur le concept central de système (« le tout est plus que la somme des parties »), et sur le principe que « les agriculteurs ont des raisons de faire ce qu’ils font ». Les travaux ont permis d’expliquer pourquoi certaines technologies se diffusaient faiblement dans les fermes, et de montrer que les agriculteurs pouvaient eux-mêmes être source d’innovation.

Malgré des résonances évidentes avec la biodynamie (cf. notion d’organisme agricole, cercles expérimentaux de fermes…), les échanges à ce jour ont été limités, même si plusieurs chercheurs ont identifié un potentiel de collaboration. Dans le cadre du Métaprogramme Inrae Metabio (changement d’échelle de l’agriculture biologique), le projet Synbiose (Syntropie, Biodynamie, Syncrétisme épistémologique) apporte des éléments tangibles de synergies possibles, sur des thématiques comme le développement de la polyculture-élevage autonome, la formation et les apprentissages.

Plus qu’un simple nouveau « cas d’application », la biodynamie interroge en profondeur les cadres et présupposés de la systémique agraire. Réciproquement, la systémique agraire ouvre de nouvelles possibilités d’évolution et de développement de la biodynamie. Ce dialogue émergeant pourrait préfigurer une nouvelle génération de recherches transdisciplinaires, plus aptes à impulser et accompagner des transformations sociétales à la hauteur des enjeux de durabilité.

Comment les éleveurs en biodynamie ont fait évoluer la recherche ? Panorama général des recherches en élevage et focus sur les travaux de sélection des races.

Mardi 9 avril 2024 à 20h

Avec Anet Spengler, chercheuse au FiBL en Suisse, Département des sciences animales. Cogestion du groupe Détention animale & sélection.

100 ans après le Cours aux Agriculteurs, comment la vision holistique de Rudolf Steiner, qui place l’animal au cœur de l’organisme agricole en biodynamie, a-t-elle influencé les pratiques d’élevage ? Anet Spengler, chercheuse au FiBL en Suisse, montrera comment éleveuses et éleveurs, qui ont cherché à mettre en pratique les indications de Steiner, sont venus questionner la recherche scientifique afin de faire évoluer les connaissances et les pratiques agricoles. Après un panorama des grands thèmes de travail en lien avec l’élevage en biodynamie (garder des vaches avec des cornes, élever les veaux sous la mère, abattage à la ferme), Anet proposera un développement sur le thème moins connu de la sélection adaptée à l’environnement de la ferme.

La biodynamie permet-elle de produire des aliments de qualité ?

Mardi 16 avril 2024 à 20h

Avec Jean-Michel FLORIN, coordinateur du Mouvement de l’Agriculture Biodynamique et co-responsable de la section d’Agriculture au Gœthéanum, Université Libre de Science de l’Esprit.

Depuis toujours, l’une des préoccupations essentielles de l’agriculture biodynamique a été de produire des aliments de qualité. Mais qu’est-ce que la qualité et comment l’évaluer ? La qualité inclut l’apparence des produits, leur composition mais aussi leur la vitalité, l’authenticité, voire l’éthique du mode de production. Comment la qualité biodynamique se développe-t-elle et comment peut-on l’appréhender dans sa globalité ? Se distingue-t-elle des autres méthodes ? Et quels sont les défis à relever pour une alimentation saine à l’avenir ?

Recherche-action-participative, génétique moléculaire et viticulture en biodynamie. Cheminer du dissensus vers le consensus scientifique.

Avec Jean Eugène MASSON, directeur de recherches à l’INRAE de Colmar et responsable du projet Vitirepere PNPP.

Les disciplines scientifiques étudient autant que proposent des techniques agricoles et des plants et semences, pour répondre à un modèle dominant implémenté à l’échelle planétaire. Pourtant, ce modèle agricole a montré ses limites sociales, économiques, environnementales, et même philosophiques. C’est bien une autre agriculture prenant en compte l’ensemble des enjeux dont on attend de voir le développement. A cet égard, la biodynamie, basée sur une vision holistique, est une forme de réponse ayant fait ses preuves. Cela-dit, la biodynamie cherche à compléter les savoirs d’expérience paysans avec des validations scientifiques venant du monde de la recherche. Elle attend aussi par ce biais la construction de relations entre les agriculteurs en conduite conventionnelle et biologique, avec ceux engagés en biodynamie. Se dessinent donc à la fois des questions relevant des sciences humaines et des sciences agronomiques et biologiques. Pourtant, les disciplines scientifiques, dans leur quête d’excellence, se sont tant isolées les unes des autres qu’elles ne peuvent lire et encore moins résoudre les problématiques dans leur complexité. Nous appuyant sur dix ans d’expérience, nous montrerons qu’une approche de recherche-action-participative transdisciplinaire REPERE se libère des contraintes de la recherche standard. Cette recherche reconnait à la fois les savoirs d’expérience de viticulteurs en conduites conventionnelle, biologique et biodynamique, et ceux des chercheurs, dans des projets qui les lient. Le cadre épistémologique a transformé toutes les étapes de la recherche, de la formulation des questions à la génération de connaissances, et jusqu’à la mise en œuvre des actions, en associant tous les acteurs. Nous avons ainsi montré que l’immunité de la vigne est à la fois plus active et plus réactive aux stress du climat et des maladies lorsqu’elle est cultivée en conduite biodynamique. Cette recherche-action-participative a ainsi à la fois produit des connaissances originales sur la biodynamie, obtenu une reconnaissance de la communauté scientifique, donné envie à des vignerons en conduite conventionnelle au point de reconcevoir leurs conduites, en direction de la biodynamie, et dans le fond, montré à tous, que la complexité est une ressource.

Influences lunaires et cosmiques sur la vie des plantes : voyage au cœur d’une controverse.

Mardi 30 avril 2024 à 20h

Avec Ernst Zürcher, ingénieur forestier, docteur, professeur émérite et chercheur en sciences du bois dans plusieurs hautes écoles suisses. Il est l’auteur de plusieurs livres sur les interactions entre les arbres et le lien avec les enjeux écologiques actuels, notamment « Les arbres, entre visible et invisible » et « À l’écoute de la forêt ».

L’influence du Soleil sur le développement des plantes est bien connu ne fait pas l’objet de dissensus au sein de la communauté scientifique, ni chez les jardiniers et agriculteurs qui auraient du mal à se passer de cet astres pour leurs travaux agricoles. Il n’en est pas de même pour l’influence lunaire. D’un côté, de nombreuses traditions et coutumes agraires font état de relations entre les phases et mouvements de la Lune et la croissance des plantes, et sont toujours pris en compte par certains jardiniers et paysans. D’un autre côté, les scientifiques modernes ont généralement été sceptiques sur la possibilité même de cette influence, notamment par manque d’une théorie capable de l’expliquer. Pourquoi étudier l’influence supposée de la Lune sur les plantes alors que celle-ci ne serait tout simplement pas pensable ?

Ernst Zürcher n’a pas suivi cette voie. Au cours de sa carrière de chercheur, il a pris le phénomène lunaire comme hypothèse de travail, à partir des dictons et affirmations des gens de terrains, notamment les forestiers. Ses recherches l’ont mené à faire des expériences et des découvertes sur les influences de la lune sur les plantes, notamment en lien avec le rythme synodique (pleine lune / nouvelle lune) et le rythme sidéral (passage de la lune devant les constellations du zodiaque). Retour d’expérience et mise en perspective.

Par-delà nature et viticulture. Les nouvelles approches holistiques, sensibles et créatives en viticulture.

Mardi 7 mai 2024 à 20h

Avec Alexandre Grandjean, socio-anthropologue des religions, affilié à l’Institut de sciences sociales des religions (ISSR) de l’Université de Lausanne, où il obtient son doctorat en 2022.

Les recherches d’Alexandre Grandjean portent sur le vieillissement en Église, les transformations contemporaines des paysages socioreligieux et les processus de popularisation des registres spirituels dans les cultures ludiques, économiques, politiques, agricoles et militantes en Europe de l’Ouest. De 2015 à 2021, il collabore à deux projets de recherche successifs à l’Université de Lausanne sur l’écologisation du religieux et la spiritualisation de l’écologie en Suisse. Dans ce cadre, il conduit son enquête doctorale sur le déploiement de nouvelles sensibilités agroécologiques et spirituelles dans les métiers de la vigne et du vin. Ses articles peuvent être consultés dans des journaux comme Ethnologie française, Archive des sciences sociales des religions, Social Compass, Journal of Religion in Europe ou alors Journal for the Study of Religion, Nature and Culture.

Les récents engagements vignerons dans les lignes de conduite des agricultures biologiques sont marqués par de nombreuses circonvolutions auprès d’expert·es et formateur·trices tant agronomiques qu’holistiques. Toutefois, et de manière spécifique aux métiers de la vigne et du vin, c’est derrière l’étiquette de la biodynamie que vignerons et vigneronnes indiquent une première recherche de ressources alternatives afin de prendre soin de leurs sols, de leurs vignes et de leurs vins. A travers ce que je qualifie d’un « moment biodynamique » dans leur parcours vie, ces derniers précisent que leurs découvertes et expérimentations avec ces lignes de conduite coïncident souvent avec une logique de liaison : entre vie privée et publique, savoirs subjectifs et objectifs, mais aussi entre référents agronomiques et spirituels. Ce « moment biodynamique » et ces logiques de recoupements les engage ainsi dans des forme à la fois d’individualisation de leur pratique agricole, mais aussi d’exploration de nouvelles approches holistiques, sensibles et créatives de la vigne, tout autant que du Vivant. Ce faisant, les populations vigneronnes négocient l’héritage anthroposophique de la biodynamie au prisme d’autres formes contemporaines de contre-culture spirituelle, complexifiant d’autant plus cet objet social en mouvement et non-stabilisé qu’est l’agriculture biodynamique, et plus largement les agricultures alternatives.