Les bactéries et les champignons interagissent 30 fois plus en biodynamie

Ecovitisol

Dans le cadre d’un wébinaire visible en replay sur YouTube, Lionel Ranjard, directeur de recherche à l’INRAE de Dijon, UMR Agroécologie, a présenté le 12 novembre 2020 les premiers résultats d’une étude d’envergure sur la biologie des sols en viticulture.

Avertissement : ces résultats sont préliminaires et n’ont pas encore fait l’objet d’une publication scientifique revue par les pairs. Ils sont donc à prendre avec des pincettes.

Lionel Ranjard est spécialiste d’écologie microbienne des sols à l’INRAE de Dijon. Il mène depuis plusieurs années des projets de recherche participatifs avec des agriculteurs et d’autres collègues, notamment Jean Masson de l’INRAE de Colmar.

Dans le cadre de ces projets, les chercheurs sont régulièrement interpellés par les agriculteurs sur les effets de la biodynamie sur la qualité biologique des sols, un thème pour lequel il existe peu de références au sein de l’INRAE ou d’autres organismes de recherche.

Le projet EcoVitiSol a été mis en place pour répondre à cette question, en prenant l’entrée des modes de production (conventionnel, bio et biodynamie).

Ce projet rassemble 150 parcelles sur 3 vignobles : Alsace, Bourgagne du Nord et du Sud. 50 parcelles sur chaque vignoble, dont 1/3 de parcelles en conventionnel, 1/3 en bio et 1/3 en biodynamie.

Les mesures réalisées portent sur l’abondance et diversité microbienne des sols avec les outils d’analyse moléculaire récents développés par les chercheurs. Les résultats préliminaires montrent, sans trop de surprises, que le travail du sol et les pesticides ont globalement un impact négatif sur le bilan microbiologique. A l’inverse, l’enherbement, les amendements organiques ainsi que la restitution des sarment ont un impact positif sur la biologie du sol.

Si on regarde les modes de production, on peut remarquer que la bio et la biodynamie présentent des bilans globalement meilleurs. On observe une grande variabilité au sein de chaque mode de production, ce qui invite à ne pas être clivant en considérant ces différents systèmes. Cependant, les résultats montrent que la biodynamie se démarque clairement de la bio et du conventionnel en terme de diversité microbienne.

Présentation de l’état biologique des sols selon les modes de production. En rouge : situation critique et vie du sol altérée. Orange : situation non critique mais préoccupante. Vert : très bonne qualité biologique.

Là où les résultats (préliminaires) de cette étude sont intéressants, c’est lorsqu’on regarde les interactions entre les bactéries et les champignons. Les chercheurs observent une augmentation très significative entre les parcelles cultivées en bio (1700 liens) et celles cultivées en biodynamie (49 000 liens), soit 30 fois plus d’interactions. Il semble donc que « la biodynamie explose les réseaux d’interactions des communautés microbiennes des sols », bien que les chercheurs ne savent pas à ce jour expliquer l’origine de ces résultats. S’agit-il de l’effet des préparations biodynamiques ? S’agit-il de la technicité des vignerons et de leur proximité avec leurs culture ?

Représentation des réseaux d’interactions des microorganismes dans les sols viticoles selon les modes de production : biodynamie, AB et conventionnel.

Si ces résultats très encourageants doivent encore être confirmés dans les années à venir – le projet EcoVitiSol est programmé jusqu’en 2023, ils sont déjà cohérents avec des travaux précédents sur la microbiologie des sols en biodynamie réalisés récemment en Espagne et aux Etats-Unis.