Les sols cultivés en biodynamie semblent favoriser les micro-organismes promoteurs de la croissance des plantes

Vidéo & Traduction synthétique d’un article de Felix Milke et al. publié en janvier 2024 dans la revue ISME Communications, Volume 4, Issue 1. DOI : https://doi.org/10.1093/ismeco/ycae021.

Titre original : Enrichment of putative plant growth promoting microorganisms in biodynamic compared with organic agriculture soils.

Résumé

La capacité des sols à maintenir leur capacité de production biologique, définie comme la santé des sols, est fortement influencée par l’activité humaine, notamment l’agriculture. Par conséquent, la gestion des sols a toujours été une préoccupation pour l’agriculture durable et il faut trouver de nouvelles méthodes qui tiennent compte à la fois de la santé des sols et du rendement des cultures. La biofertilisation à l’aide d’inoculant microbiens apparaît comme une alternative prometteuse aux interventions conventionnelles comme la fertilisation minérale excessive et l’utilisation d’herbicides. Les préparations utilisées en biodynamie ont divers effets sur les propriétés du sol comme la biomasse microbienne et la respiration. Nous avons mené plusieurs expériences de biomarqueurs pour déduire l’effet des préparations sur les communautés procaryotes et fongiques du sol puis nous avons comparé les résultats à ceux d’une conduite en agriculture biologique. Les variants de séquences d’amplicons susceptibles de favoriser la croissance des plantes ont été quantifiés à l’aide d’une base de données commerciale sur la base de leur identité taxonomique. Nous avons trouvé un nombre significativement plus élevé de variants de séquences d’amplicons favorisant la croissance des plantes dans les sols gérés en biodynamie que dans les sols gérés de manière biologique. En outre, les variants de séquence d’amplicons procaryotes enrichis dans les préparations biodynamiques ont été trouvés en plus grand nombre dans les sols gérés en biodynamie, ce qui indique une colonisation réussie après le traitement. Les expériences ont été menées sur 3 sites en Allemagne et 21 sites en France, couvrant différents types de cultures et de sols. Dans l’ensemble, nos résultats indiquent que les préparations biodynamiques peuvent agir comme des biofertilisants qui favorisent la santé du sol en augmentant l’abondance des micro-organismes qui favorisent la croissance des plantes.

Introduction

La dégradation des écosystèmes à grande échelle est une conséquence de l’intensification de l’agriculture en raison de l’application de pesticides, de la consommation des réserves d’eau et de la dégradation des sols, qui est un problème croissant avec l’augmentation de la population mondiale [1, 2]. Pour contrer cette évolution, des systèmes à faibles intrants, tels que l’agriculture biologique ou biodynamique, sont apparus comme des alternatives durables aux stratégies agricoles conventionnelles [3]. Ces deux stratégies agricoles partagent des principes similaires, tels que l’absence d’utilisation d’engrais ou de pesticides de synthèse. Cependant, l’agriculture biodynamique promeut l’utilisation de composts, l’intégration du bétail et la réduction des intrants externes dans une plus large mesure que l’agriculture biologique. Une différence essentielle entre l’agriculture biologique et biodynamique est l’application de préparations dites biodynamiques qui ont été proposées au début du 20e siècle par Rudolf Steiner [4], le fondateur de l’agriculture biodynamique. Ces préparations sont appliquées sur le sol ou les cultures (préparations à pulvériser), soit sur le fumier (préparations du compost). Les préparations du compost sont constituées de différentes plantes sauvages fermentées en combinaison avec différents organes de ruminants. Les préparations à pulvériser sont constituées de fumier fermenté ou de la poudre de silice (préparation BD500 : bouse de corne et préparation BD501 : silice de corne) stockés dans des cornes de vaches et enfouis pendant 6 mois dans le sol. Après fermentation, les produits hautement dilués sont pulvérisés sur les cultures où ils ont montré une amélioration de plusieurs paramètres : stabilité des agrégats du sol [5], activité du sol et disponibilité des nutriments plus élevée [6, 7], rendement plus élevé des légumes ou des céréales [69], teneur plus élevée en composés végétaux secondaires [10, 11], et promotion de la germination des graines dans la génération suivante [12]. Malgré les nombreux bénéfices sur les cultures qui pourraient être associés à l’utilisation des préparations biodynamiques, certains cas ne font état d’aucune différence significative entre les modes de gestion agricole avec ou sans préparations biodynamiques [13, 14]. Les observations à long terme effectuées sur plusieurs sites expérimentaux par Raupp et König [15] indiquent que les préparations biodynamiques ont un effet régulateur sur le système : ils ont constaté que dans des conditions de croissance défavorables, le rendement des cultures était augmenté, alors que dans de bonnes conditions de croissance avec des apports élevés à très élevés en nutriments, le rendement des cultures n’était pas affecté ou même réduit lorsqu’elles étaient traitées avec des préparations biodynamiques.

Les préparations biodynamiques ont des taux d’application aussi faibles que 100 g/ha pour la bouse de corne et 4 g/ha pour la silice de corne, de sorte que leur effet ne peut pas être simplement attribué à l’apport d’éléments nutritifs. La bouse de corne est appliquée en automne et au printemps en grosses gouttes sur le sol humide. La silice de corne est pulvérisée sur les feuilles en un fin brouillard pendant la période de végétation. Les deux sont appliqués une à quatre fois par an. Il existe différents modèles explicatifs pour décrire l’effet des préparations sur les cultures. Par exemple, la production de préparations à base de bouse de corne implique une lente fermentation grâce à des microbes dans des conditions de manque d’oxygène dans le sol. Cette fermentation peut produire des molécules de signalisation telles que des hydrates de carbone et des peptides auxquels les microbes réagissent même à de très faibles concentrations [16]. Cela pourrait conduire à une augmentation de l’activité microbienne dans la rhizosphère [1719] ou stimuler les défenses naturelles des plantes [20, 21]. Une autre explication complémentaire du mode d’action potentiel des préparations pourrait être les effets de promotion de la croissance des plantes à partir d’une médiation microbienne. Par exemple, des souches bactériennes produisant de l’acide indole acétique (IAA) ont été détectées dans les préparations à base de bouse de corne [22]. Selon Spaccini et al. [16], la bouse de corne contient également des résidus de lignine ayant une activité similaire à l’IAA. En outre, des effets similaires à ceux de l’auxine et de l’acide gibbérellique ont été trouvés dans les préparations de bouse de corne et de silice de corne, respectivement [17].

On suppose que les effets bénéfiques des préparations biodynamiques sur les plantes peuvent être induits par un renforcement de la symbiose entre les plantes et les microbes, soit par une colonisation réussie des microbes bénéfiques présents dans les préparations [23], soit par une stimulation de l’activité microbienne dans le sol avec des composés biolabiles [16]. Les effets positifs significatifs des préparations à base de bouse de corne et de silice de corne sur la respiration microbienne dans les sols [24] confirment l’hypothèse d’effets médiateur microbien sur les plantes. En outre, une analyse récente des microbiomes du sol, gérés selon différentes pratiques agricoles a révélé un lien étroit entre les pratiques de gestion et la structure des interactions microbiennes, où la gestion biodynamique en particulier a augmenté la stabilité des communautés microbiennes en favorisant des communautés plus densément connectées [25]. Il est donc prouvé que les préparations biodynamiques ont un impact sur les communautés microbiennes du sol qui favorisent les effets observés sur la croissance des plantes.

Dans la présente étude, nous avons cherché à déduire les changements dans la composition des communautés procaryotes et fongiques des sols agricoles associés aux préparations biodynamiques [BD500 ou BD500P (“P” : traité avec une préparation supplémentaire, voir ci-dessous) et BD501]. Nous avons suivi l’occurrence des variants de séquence d’amplicon (ASV) enrichis dans les préparations biodynamiques au sein des communautés microbiennes des sols gérés en biodynamie pour observer une colonisation microbienne réussie. En outre, nous déduisons les effets bénéfiques potentiels pour les plantes associés aux changements observés dans les communautés. Pour ce faire, nous avons attribué des effets bénéfiques potentiels pour les plantes aux identités taxonomiques des ASV microbiens en utilisant une base de données commerciale (Biome Makers) que nous avons validée avec une base de données interne fondée sur des publications évaluées par des pairs. Nous avons cherché à analyser les hypothèses suivantes :

  1. Les préparations biodynamiques à pulvériser affectent la composition de la communauté microbienne des sols, soit par une colonisation du milieu réussie à partir des micro-organismes contenus dans les préparations, soit par une biostimulation.
  2. L’application de préparations biodynamiques à pulvériser augmente le nombre de micro-organismes favorisant la croissance des plantes dans les sols.
  3. Les préparations biodynamiques à pulvériser contiennent des proportions élevées de micro-organismes favorisant la croissance des plantes.
  4. L’augmentation du nombre de micro-organismes favorisant la croissance des plantes induite par les préparations biodynamiques est transitoire.

Nous avons appliqué notre approche à quatre configurations expérimentales différentes pour tester nos hypothèses, où nous avons utilisé un plan en blocs pour analyser l’effet des préparations biodynamiques sur un large éventail de sols avec diverses cultures, à différents endroits du centre de l’Allemagne et de la France à deux moments, et à certains endroits également dans une série chronologique de 15 semaines pour suivre la dynamique de la colonisation du sol et les effets bénéfiques potentiels pour les plantes.

Matériel et méthode

Résumé par la figure 1. Pour plus d’informations, lire l’original.

Figure 1 (A) Plan en blocs des parcelles expérimentales. Chaque parcelle de Darmstadt, Geisenheim et Frankenhausen a été divisé en quatre blocs. À Geisenheim et à Frankenhausen, un bloc a été traité pour moitié avec des préparations biodynamiques (BD++) et pour moitié sans préparations biodynamiques, à titre de contrôle (BD-). À Darmstadt, nous avons analysé l’effet de l’intensité de l’application en utilisant une seule application (BD+) comparée à trois applications de préparations biodynamiques (BD++). En France et dans les essais de séries temporelles (TS), les parcelle ne contenaient qu’un seul bloc divisé en deux sans et avec BD (BD- vs. BD+). (B) Chronologie des expériences, y compris les moments des traitements de préparation biodynamique (les pulvérisations sont marquées par des rectangles selon la légende) et les moments de l’échantillonnage du sol (marqués par des triangles). La période entre la première et la dernière pulvérisation est soulignée par une ligne bleue. Les villes allemandes sont indiquées par leur nom, tandis que les villes françaises ont été regroupées dans l’expérience France (voir le tableau supplémentaire S2 pour les emplacements détaillés). Le nombre de répétitions est indiqué à gauche.

Résultats

Résumé par la figure 2. Pour plus d’informations, lire l’original.

Figure 2. Analyse quantitative des fonctions potentielles de promotion de la croissance des plantes exercées par les communautés microbiennes du sol. L’abondance fonctionnelle est représentée par l’indice BeCrop de Biome Makers et varie de 1 à 6. Les fonctions microbiennes qui favorisent la croissance des plantes sont séparées par la production d’hormones et l’adaptation au stress. Les fonctions individuelles sont représentées en couleurs claires et les groupes fonctionnels en couleurs foncées. Les traitements sont représentés par une couleur selon la légende. Les barres d’erreur représentent les erreurs standard et la hauteur des barres indique les valeurs moyennes.

Les symboles au-dessus des barres représentent la signification statistique : T = Valeur P < 0,1, ∗ = Valeur P < 0,05, ∗∗∗ = Valeur P < 0,01. Les diagrammes à barres sont séparés par lieu d’expérimentation en Darmstadt, France (divers), Frankenhausen et Geisenheim.

Discussion

Nos résultats indiquent que l’application de préparations biodynamiques sur des sols utilisés à des fins agricoles a des implications sur le microbiote du sol. Notre méthodologie expérimentale visant à évaluer l’impact des modes de culture sur les communautés microbiennes du sol a couvert un large éventail de régions en France et dans le centre de l’Allemagne, de cultures, de périodes et d’exploitations agricoles, chacune présentant des propriétés de sol différentes. Nos données confirment systématiquement nos hypothèses initiales dans les diverses configurations, soulignant ainsi leur validité.

Nous avons constaté que (i) l’application de préparations biodynamiques a un effet sur la composition de la communauté microbienne et (ii) que les communautés sont principalement affectées par une augmentation des ASV qui étaient également contenus dans les préparations biodynamiques. En outre, (iii) les préparations biodynamiques étaient composées dans une large mesure d’organismes supposés favoriser la croissance des plantes et leur application a augmenté l’abondance des organismes supposés favoriser la croissance des plantes dans les communautés du sol.

Cependant, (iv) nos analyses de séries temporelles montrent que les micro-organismes favorisant la croissance des plantes (PGPM) supposés sont renforcés, avec une valeur maximale après 8 semaines et des valeurs décroissantes par la suite, dans les sols traités de manière biodynamique par rapport aux sols traités de manière organique.

Figure 3. Carte thermique de l’abondance relative des ASVs (variants de séquence d’amplicon) qui exercent des fonctions supposées favoriser la croissance des plantes selon les bases de données BeCrop pour toutes les préparations biodynamiques séquencées. Les préparations biodynamiques sont séparées en préparations à base de bouse de corne (BD500 et BD500P) et préparations à base de silice de corne (BD501). Les villes où les préparations biodynamiques ont été produites sont affichées en tant qu’étiquettes de ligne. Dans certaines villes, plusieurs préparations ont été échantillonnées, ce qui est indiqué par des chiffres après les noms des villes. Les préparations de Velden et de Zülpich n’ont pas été appliquées sur les sites expérimentaux mais ont été incluses dans l’analyse pour tenir compte de la variabilité des préparations biodynamiques.

Variabilité microbienne dans les sols agricoles

Les communautés procaryotes et fongiques séquencées ont montré une composition taxonomique très similaire au niveau du genre sur tous les sites expérimentaux. Cependant, les ASV des mêmes groupes taxonomiques différaient fortement entre les échantillons, indiquant une diversité d’espèces ou de sous-espèces. La composition taxonomique des champignons a varié beaucoup plus fortement que celle des procaryotes, ce qui est en accord avec des études antérieures selon lesquelles les processus neutres (c’est-à-dire stochastiques) sont plus importants pour l’assemblage des communautés fongiques que pour celui des communautés procaryotes [39, 40]. La variabilité des ASVs est principalement liée à la localisation de l’exploitation et aux périodes d’échantillonnage, tandis que le mode de gestion et les cultures ont eu un impact beaucoup plus faible sur les communautés résidentes du sol. Des différences marginales entre les compositions des communautés microbiennes des sols traités biologiquement et biodynamiquement par rapport à d’autres facteurs ont également été constatées par d’autres études [25, 41]. Les communautés microbiennes du sol sont très diversifiées, avec des milliers d’organismes différents trouvés dans un seul échantillon [42] et leur composition et diversité sont fortement influencées par le climat [43, 44] ou le pH [45]. Néanmoins, les pratiques culturales ont un impact mesurable sur la composition des communautés microbiennes, notamment en raison du travail du sol [46] ou du type d’engrais [41], mais leur effet sur la biogéographie microbienne des sols est mineur par rapport aux facteurs susmentionnés [46]. Par conséquent, nous avons suivi principalement les ASV contenues dans les préparations biodynamiques afin de minimiser les variations induites par d’autres facteurs. Nous avons constaté une augmentation globale significative des ASV dans les communautés de sols enrichies en préparations biodynamiques, ce qui révèle un effet direct du mode de culture sur les communautés de sols étudiées. L’augmentation de la fréquence de pulvérisation des préparations biodynamiques a encore accru l’abondance de ces ASV, ce qui indique que les préparations biodynamiques peuvent servir de réservoirs pour les amendements biologiques du sol [47]. Nos analyses de séries chronologiques ont montré que les ASV associés aux préparations biodynamiques étaient les plus abondants 8 semaines après la première inoculation, et qu’ils diminuaient par la suite. Le temps de survie des biofertilisants habituels est généralement de l’ordre de quelques semaines et dépend fortement des propriétés du sol [48] et des interactions biotiques avec la communauté du sol résidente [49].

Micro-organismes favorisant la croissance des plantes dans les préparations biodynamiques

Comme indiqué précédemment, on suppose que les préparations biodynamiques influencent les communautés microbiennes du sol par le biais de deux mécanismes indépendants : (i) l’activation microbienne via des molécules de signalisation qui s’accumulent dans les produits fermentés [16] et (ii) la colonisation réussie d’organismes favorisant la croissance des plantes qui résident dans les communautés associées aux préparations biodynamiques.

Nos résultats indiquent une forte abondance de champignons et de procaryotes promoteurs de la croissance des plantes dans les préparations biodynamiques qui produisent des phytohormones telles que l’auxine, mais qui exercent également des actions de réduction du stress, telles que la solubilisation des métaux lourds ou la production d’exopolysaccharide. Nous avons détecté des abondances plus élevées d’organismes promoteurs de la croissance des plantes dans les préparations contenant de la poudre de silice (préparation BD501) plutôt que du fumier (préparation BD500), représentées par des abondances élevées de Gammaproteobacteria, d’Actinobacteria et d’Eurotiomycetes. En général, la préparation de silice de corne abrite des communautés différentes de celles de la bouse de corne, qui est dominée par les Clostridia et les Alphaproteobacteria, et par les Morteriellomycetes. Nos résultats correspondent à ceux d’autres études [22, 23], qui ont également trouvé des abondances élevées de genres potentiellement favorables à la croissance des plantes dans les préparations biodynamiques à base de fumier et de plantes, comme Mortierella, Penicillium et Aspergillus. La fermentation et la maturation des préparations biodynamiques dans les sols conduisent à l’accumulation de composants biologiques et de composés de lignine non décomposés [16]. Des effets similaires de promotion de la croissance ont été trouvés pour les préparations de thé de compost [50] et la matière organique extractible par l’eau de différentes préparations de compost [51].

Nous émettons donc l’hypothèse que l’effet des préparations biodynamiques sur les sols pourrait être similaire à celui des amendements biologiques, tels que le compost, la paille ou le charbon bio, qui ont un impact direct sur les communautés microbiennes du sol. Ils augmentent l’activité enzymatique microbienne, la biomasse et la respiration du sol [52]. Sur la base de nos résultats, nous supposons que les sols gérés de manière biodynamique diffèrent des sols gérés de manière biologique en raison de l’abondance plus élevée des micro-organismes favorisant la croissance des plantes qui sont introduits par les préparations biodynamiques, ainsi que des composés biolabiles qui peuvent avoir des effets stimulants sur les communautés résidentes.

Effet des préparations biodynamiques sur les communautés microbiennes du sol

Nous avons trouvé des preuves que les préparations biodynamiques augmentent l’abondance des organismes qui favorisent potentiellement la biostimulation des plantes via la production de phytohormones (auxine, cytokinine et gibbérelline). En outre, les organismes qui protègent les cultures des facteurs de stress biotiques et abiotiques par des mécanismes tels que la production de sidérophores ou l’augmentation de la tolérance au sel étaient également plus nombreux dans les sols gérés en biodynamie. Les préparations biodynamiques semblent favoriser l’abondance des organismes microbiens qui agissent sur un spectre fonctionnel large. Les organismes connus pour leurs propriétés favorisant la croissance des plantes remplissent souvent des fonctions bénéfiques multiples, comme les souches de l’espèce Bacillus subtilis dont l’activité favorisant la croissance des plantes a été intensivement étudiée [53]. Ce groupe bactérien favorise la croissance des plantes en améliorant la disponibilité des nutriments, en modifiant l’homéostasie des hormones de croissance et en réduisant le stress dû à la sécheresse et au sel [53]. Par conséquent, une augmentation simultanée des effets multiples des promoteurs de croissance des plantes est probable, en particulier parce que nous avons déduit des fonctions microbiennes putatives sur la base des identités taxonomiques. Nous concluons que la tendance générale à l’augmentation des fonctions de croissance des plantes dans les sols gérés de manière biodynamique reflète les abondances élevées d’organismes favorisant la croissance des plantes.

Les données de la série chronologique ont montré une augmentation des fonctions PGP dans les communautés du sol qui correspondaient aux schémas de colonisation des microbes mentionnés précédemment. Nous avons également identifié un faible succès de colonisation des microbes associés aux préparations biodynamiques dans les sols de Frankenhausen qui ont été échantillonnés 16 semaines après le premier traitement par pulvérisation. En supposant que l’effet des préparations biodynamiques soit le plus fort 8 semaines après le premier traitement, notre stratégie d’échantillonnage à Frankenhausen pourrait avoir manqué des changements significatifs dans la composition de la communauté microbienne. Les inoculants microbiens du sol sont soumis à une forte pression sélective après la colonisation, en particulier dans la rhizosphère [54]. L’inoculation de microbes directement sur le terrain peut affecter les communautés résidentes du sol [49] et est donc utilisée dans des produits commerciaux pour améliorer le rendement des cultures [55] ou protéger les plantes contre les épidémies [56, 57]. Ces biofertilisants affectent généralement les communautés microbiennes en quelques semaines, après quoi les souches inoculées perdent de leur abondance [58, 59].

D’autres études ont supposé que l’application de préparations biodynamiques favorisait la croissance des plantes à l’aide de microbes et ont détecté des organismes PGP dans les préparations biodynamiques [22, 23]. Cependant, cette étude fournit pour la première fois la preuve que ces mécanismes seront renforcés par la conduite des cultures en biodynamie par rapport à la production biologiques, en raison de la colonisation efficace des organismes PGP, via les préparations biodynamiques. Le fait que nos résultats proviennent d’études sur le terrain souligne leur pertinence pour les décisions en matière d’agriculture, mais d’autres expériences sont nécessaires pour identifier les effets des PGP qui sont améliorés au niveau génomique et la manière dont ils affectent la croissance des plantes.

Geisenheim s’est distingué dans nos essais sur le terrain car c’est la seule installation qui n’a pas exprimé d’effets accrus de PGP dans les communautés microbiennes du sol qui étaient gérées en biodynamie. Au contraire, la tendance était inverse, avec des abondances généralement plus faibles d’organismes PGP. Le vignoble de Geisenheim est couvert tous les deux ans de légumineuses qui favorisent une plus grande disponibilité d’azote pour les plantes dans les sols gérés de manière biologique et biodynamique que dans les sols gérés de manière conventionnelle [60] et se distingue donc des autres configurations expérimentales. Une disponibilité généralement élevée en nutriments pourrait réduire l’enrichissement des organismes PGP via une colonisation sélective à l’interface plante-sol [61], puisque la plante sélectionnera moins probablement les symbiotes biofertilisants [62, 63]. Ceci est en accord avec l’étude mentionnée précédemment qui a constaté une augmentation du rendement des cultures après l’application de préparations biodynamiques dans des conditions de croissance défavorables, alors que le rendement des cultures n’a pas été affecté, voire a été réduit, lorsque l’apport en nutriments était élevé [15]. Nous supposons donc que les préparations biodynamiques sont compensatoires et ont des effets positifs plus importants sur la croissance des plantes dans des conditions défavorables, ce qui est cohérent avec une colonisation sélective à l’interface entre la plante et le sol.

Les préparations biodynamiques, des amendements biologiques pour les sols

Les études qui ont analysé les propriétés microbiennes du sol en fonction de la gestion agricole ont révélé que la biomasse microbienne du sol était la plus élevée et que le rapport entre la respiration microbienne et la biomasse était le plus faible dans les sols gérés de manière biodynamique [5, 64]. En outre, la gestion biodynamique favorise des réseaux de co-occurrence densément connectés dans les communautés microbiennes du sol qui représentent des communautés collaboratives [25]. Le mode d’action des préparations biodynamiques et les circonstances dans lesquelles elles agissent restent difficiles à cerner, tout comme d’autres inoculants microbiens [57]. Des études antérieures ont révélé des effets variables des micro-organismes PGP inoculés, en fonction, par exemple, de la disponibilité des nutriments dans le sol [65] ou de la teneur en matière organique [66]. De même, l’application de préparations biodynamiques a entraîné des augmentations significatives de l’activité du sol et du rendement des cultures [6], mais dans certains cas, elle n’a pas eu d’effets significatifs [13, 14]. Les effets bénéfiques des préparations biodynamiques sur la croissance des plantes ont été détectés auparavant et étaient plus prononcés dans des conditions défavorables à la croissance des plantes [11, 15]. Nous avons trouvé des preuves de changements bénéfiques pour les plantes dans la composition de la communauté microbienne dans différents types de sols (luvisol haplique, argile, limon, limon sableux) en Allemagne et en France et pour différentes cultures (vigne, avoine, épeautre, blé, pois chiches, seigle, orge, ail, lin, tournesol). Étant donné que les effets bénéfiques sur les plantes sont assurés par les microbes, nous supposons qu’il est nécessaire d’approfondir les interactions entre les bactéries et les plantes pour mieux comprendre dans quelles conditions les amendements biologiques ont des effets bénéfiques mesurables. En outre, si la somme de ces effets peut favoriser la santé du sol, leurs implications sur le rendement et la qualité des cultures restent incertaines [67]. Par conséquent, des études supplémentaires devraient se concentrer sur la phyllosphère et la rhizosphère, où les microbes provenant du traitement par pulvérisation peuvent s’établir et interagir avec les plantes et favoriser leur croissance [68, 69]. Des analyses métagénomiques et métatranscriptomiques sont nécessaires pour vérifier non seulement le potentiel génomique des souches inoculées, mais aussi si leurs fonctions de promotion de la croissance des plantes sont exprimées et dans quelles conditions.

Références

Voir l’article original.

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